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Lorsqu?un chirurgien se voit reprocher d?avoir oublié une compresse dans l?abdomen de son patient, il n?a que deux solutions pour s?en sortir. La première, d?avouer sa faute et d?attendre, de ce fait, la légitime réaction de son patient : la colère.
Et puis il existe pour lui une autre stratégie : convoquer la presse au 20 heures, déclarer solennellement que le nombre de compresses oubliées augmente dramatiquement partout dans le monde, et que, désormais il faut déclarer la guerre totale aux compresses oubliées. Et là surgit une deuxième réaction : la peur.
Parce que la peur et la colère sont des affects incompatibles. La peur éloigne des bâtiments officiels, des reproches et?de la colère. La peur pétrifie. Elle ne fait pas tomber les murs.
La colère, elle, décapite les rois, évince les démocrates mous, et même les dictateurs, parfois. La colère galvanise. Elle est parfois le ciment nécessaire.
Des pays avisés de la chose ont fait en sorte que la colère soit définitivement canalisée. C?est le cas de la Chine, de Cuba, de la Russie, et un peu l?Allemagne. Ils peuvent désormais faire une navette aérienne vers Milan, et la Lombardie, nous prêter des lits..La peur fait partie de leur quotidien, d?avant et d?après virus.
D?autres, moins bien lotis, ont régulé sur la taille des camemberts, le nombre de sachets plastiques validés par l?Europe, les indemnités des députés ?et pas sur l?indépendance de l?approvisionnement en masques. A désormais anticiper (il est bien temps) sur l?ampleur des colères, ils utilisent un magnifique relais : la presse, pour majorer nos peurs.
Nos dirigeants sont avant tout les gérants de nos joies, de nos peines, de nos récompenses. Ils sont aussi les gérants de nos affects. Ils ont oublié tant de compresses dans leur abord chirurgical du nouveau monde qu?ils en ont, négligemment, oublié le renouvellement des masques.
Dr Bruno Lopez - Toulouse
