Les pâtes au logis pour attendre l?embellie, les pathologies pour les vieux, et les co-morbides. Notre société s?est trouvée mal que seuls les vieux d?ehpad ne soient pas exterminés. Le basculement de la terreur est advenu au premier « jeune » à réanimer. Comme si le choix monstrueux du « tri » était déjà admis, par anticipation. Il serait moins triste qu?un vieux philosophe meurt , plutôt qu?un jeune footballeur. Fienkelkraut moins que Neymar. Mme Badinter moins que Marlène Schiapa.
Les érudits de la médecine, issus de sociétés savantes, passent, eux, plus de temps sur leurs plateaux TV que dans les blocs de réanimation. Curieusement, les porte-parole de la pensée généraliste, désormais impliquée, sont des représentants syndicaux. Un peu comme lorsque la pensée de la police, durant les gilets jaunes, était réservée à ces mêmes représentants syndicaux. Ce qui ressort de ces plaidoiries est le manque de masques.
Comme on a largement méprisé les citoyens de base affairés à dévaliser les superettes, on pourra, un jour, en faire tout autant de tous ces « sachants » grisés de pouvoir répondre à tout, parfois, sur ce qu?ils ne savent pas, et à rien sur ce qu?ils savent de trop. Ils vont d?un plateau à l?autre, comme les populations affolées sautent du rayon hygiène à la pénurie du rayon jambon.
Dans les ministères, la vraie question n?est pas de prévoir s?il y aura assez de masques par soignant, mais combien il y a d?administratifs par masque alloué. C?est cela la vraie question. Notre pays est saturé de gestionnaires de crises affairés à garder la bonne posture vis-à-vis de crises qu?ils n?ont pas prévues, ou juste anticipées. Et d?aides- soignantes dépourvues de masques.
Déjà hier l?eau de Venise s?est éclaircie. Les poissons reviennent étonner les habitants. Il aura suffi de faire (malheureusement) disparaître 3000 italiens pour sceller l?union des coronavirus et des poissons rouges. Au carnaval annulé, la nature pavanera sans masque.
Notre civilisation nous a demandé ces vingt dernières années de sortir de chez nous résolument, frénétiquement, sans autre motif avouable que celui de la consommation. Le moral des ménages avait deux paramètres. La courbe ascendante de l?achat de biens matériels, et le pic exponentiel de l?individualisme consumériste.
Depuis trois jours, chaque citoyen doit dire au gendarme, puis à lui-même, pourquoi il sort. Faire ses courses, aller voir un médecin, aller à son travail. Un « metroboulododovirus » mal fichu, absurde et auto- consenti.
Il n?est pas dit que notre cerveau reptilien puisse longtemps s?infléchir à un tel exercice. Derrière les masques à fabriquer, il y a surtout tous ceux qu?il faudra faire tomber.
Dr Bruno Lopez - Toulouse