Il ne se passe pas de jour sans qu?un féminicide ne vienne alimenter la chronique des faits divers. L?homme, généralement sans emploi, se retrouve face au constat terrible que « sa compagne ne le veut plus ». Le cas le plus pathétique sera celui de cet homme incarcéré, dont la partenaire, le visitant en parloir, annonce sa séparation prochaine. L?homme, furieux, et à l?abri des gardiens, saute à pieds joints sur la tête de sa compagne qui décède, deux jours après, en réanimation.
Les «parking-icides» sont une autre manifestation de l?intolérance à la frustration. L?homme, généralement sans emploi ET possesseur d?une voiture (et, « accessoirement », de sa compagne..) ne peut pas davantage supporter de se faire voler une place de parking qu?il ne pouvait, tout à l?heure, supporter qu?on lui vole son objet de désir. Alors il poignarde celui qui a volé la place, préférant gager sa vie sur les dix ans à venir plutôt que de céder la place.
L?élimination des rivaux, des opposants idéologiques, des contrevenants du couple, ou de la circulation routière, atteignent ces proportions, désormais alarmantes, pour deux raisons. La première est que chaque alter ego devenu contrariant devient une porte à enfoncer. La deuxième est que tout un chacun oublie que la compétition « statistique » des portes, et sa perpétuelle proclamation ,ne font qu?exacerber l?art insensé de supprimer son, sa prochain.e.
Imaginer qu?une femme n?est pas une bagnole, imaginer qu?un goujat ne mérite point que l?on tue pour son regard, ou son clignotant, reviendrait à une saine révolution. Chaque porte qui nous contrarie, chaque malheur, que la sottise et l?immaturité génèrent, méritent que nous revenions à cette notion simple.
Il existe possiblement un trousseau de rechange à tout malheur, à toute frustration. La possibilité pour l?homme abandonné de refaire sa vie, la possibilité de trouver une autre place de parking si quelqu'un vous la dérobe. Ce trousseau de rechange, ce ne sont pas les gardiens qui le possèdent, pas plus que les psychiatres. Mais nous-mêmes, et tous ceux qui ne s?en souviennent plus.
Dr Bruno Lopez - Toulouse