Nous sommes à discuter ferme autour du « Capi », dernière mouture du grand pacte sanitaire visant à résoudre les problèmes de fin de mois de l?assurance maladie. Nous le faisons tout en réclamant « enfin » la reconnaissance de la médecine générale.
La France rurale « se meurt » avec la désertion de ses généralistes. Mais les élus locaux ne veulent point forcément des médecins éclairés de savoir moderne, ils veulent juste une sorte d?assistante sociale surdiplômée, et garante du maintien d?un tissu social qui s?effiloche tout autant dans ses banlieues que dans ses campagnes.
Une nouvelle venant des Etats-Unis, pays sans médecins généralistes, peut éclairer notre lanterne vacillante.
Le Medicare, la sécurité sociale étasunienne des pauvres sans mutuelle, quasi faillitaire, vient de donner « carte blanche » au remboursement systématique ( par les caisses de l?Etat) , de tous les médicaments anti-néoplasiques, y compris hors des indications initiales fournies par les autorités sanitaires. Il n?y aura plus de refus préalable de ces prescriptions. Seul sera possible un recours de contestation émanant , au cas par cas, des autorités.
Ici, en vrac , l? Ordre des médecins, les syndicats de généralistes unanimes ont rejeté le Capi, qui était sensé permettre l?organisation d?une médecine prescriptive intelligente, intéressée aux économies de santé. Le plus cocasse étant que les seconds, d?ordinaire assez rétifs aux dogmes d?une institution qui avait un jour refusé le droit à l?IVG, en appellent à l?instance ordinale pour justifier le front du refus.
Un lucide état des lieux, confronté à la modélisation sanitairement irrationnelle de la grippe américaine, indique que nous nous trompons de cible, dans notre refus systématique de toute redéfinition professionnelle.
Les sociétés occidentales vont se retrouver dans une situation de banqueroute sanitaire. Non point seulement parce que l?argent ne rentre plus ( à cause du chômage), mais aussi parce que les dépenses sanitaires seront de plus en plus orientées par le mariage forcé entre l?émotionnellement porteur ( les stocks de tamiflu, les vaccins contre le papilloma virus, les grands-messes préventives sur la prostate et le sein ) et l?industriellement correct ( permettre aux industries du soin de faire des bénéfices ).
L?élu de la Maison Blanche , qui veut moraliser « son » système, alors que les réserves du médicare seront épuisées en 2012, n?a que peu de chances de réussir, pas plus que ne le pourra le directeur de notre propre assurance-maladie qui nous demande de faire des économies de bouts de chandelle tandis que des milliards se répandent en stratégies uniquement médiatiques.
Le généraliste français, lui, qui réclame son euro de reconnaissance, n?est pas au bout de sa peine.
Si sa disparition est une réelle menace pour la survie des campagnes, elle est surtout un réel espoir pour l?abolition de tout sens critique, envers le grand « big-bang » sanitaire qui permettra de dé rembourser le « simplement utile » au simple profit de l? «émotionnellement rentable », n?en déplaise à monsieur de Rockenghem..
Le Capi n?est pas plus une menace pour nous que ne l?est son abandon sous de mauvais prétextes.
La médecine générale « adjudante » ( et grommelante ) du système de santé en est arrivée au stade de sa caporalisation à marche forcée.
Et dans ce contexte le Capi n?est que l?imposition, à vocation contrariée, d?un galon mal défini pour des sans-grades en voie de non définition .
Dr Bruno Lopez - Toulouse