| | | |
.jpg)
Il y a une dizaine de jours, comme beaucoup de personnes ayant vacciné ses patients à coup d'Astra zénéca, j'ai passé avec ma femme une dizaine d'heures à transférer 150 rappels de vaccination de la 9ème semaine à la 12ème semaine et à redonner des rendez vous sur les plages libérées. Les ponts du mois de mai servent habituellement à faire de la remise en état du jardin, mais il faut savoir faire varier les plaisirs.
150 transferts via un site bien connu de secrétariat sur internet, 150 mails via ma boite personnelle pour confirmer qu'il ne s'agissait pas d'un canulars car les retours de patients n'ont pas tardé à tomber . Tout cela bien sûr s'est fait patient par patient car le transfert de rendez vous en bloc n'est pas possible.
Ce transfert de rendez vous m'a libéré des plages horaires et m'a permis de relancer les patients de ma liste d'attente.
Les retours ont été intéressants..
Concernant les transferts de rendez vous, beaucoup de patients du fait de leur âge (+ de 55 ans) ont prévu de partir en vacances avant tout le monde. Je leur ai signalé dans le mail que le rappel peut aussi se faire sur leur lieu de vacances. Parmi cette population, par retour de mail, certains ont évoqué la possibilité de reporter leurs vacances ; d'autres m'ont dit avoir pris rendez vous avec des centres de vaccination pour être vacciné via un vaccin ARN car, soit parce que le contenu des médias les incitait à ne prendre aucun risque avec les vaccins à adénovirus, soit parce qu'ils avaient des effets secondaires de type fièvre ou fatigue. Aucun d'entre eux n'avait eu de difficulté à switcher Astra/Pfizer. Certains même ont réussi à garder l'ancienne date de rappel, soit 9 semaines.
Compte tenu de leurs situations ou de leurs motivations, ils ont eu raison.
Concernant la relance des patients en liste d'attente, les 4/5èmes étaient vaccinés. Lors de leur mise sur liste d'attente, mon message avait été clair : les vaccins arrivent de façon très irrégulière, inscrivez vous partout où c'est possible et vaccinez vous au plus tôt, sans état d’âme à mon égard. La surprise a été que sur la soixantaine de personnes de plus de 55 ans que nous avons contacté, une seule a été vaccinée par Astra zénéca, tous les autres ont été vaccinés par vaccin ARN.
Notez que vu de loin, le fonctionnement des centres où sont passés mes patients ressemble plus à « qu'est-ce-que je vous sers ma p'tite dame »
Le message gouvernemental qui nous dit « vaccinez ces personnes par vaccin à adénovirus » laisse un peu perplexe: a qui s'adresse t il ? Les centres de vaccinations fonctionnent-ils comme des électrons libres ?
Pour le gouvernement et les autorités sanitaires, il est trop tard pour rattraper le coup, même si les vaccins à adénovirus ne génèrent « que » 2 décès par million de personnes vaccinées, et donc évitent 2000 décès et quelques centaines de milliers de personnes souffrant de complications durables, les vaccins à ARN font a priori zéro décès. De surcroît, avec des cas de thromboses létales constatées chez des personnes de plus de 55 ans, notre argument principal d’innocuité tombe à l'eau.
Ne perdons pas de vue que beaucoup de personnes ajournent leur vaccination par vaccin à adénovirus en attendant de pouvoir bénéficier de vaccins à ARN : le nombre de personnes qui vont décéder du coronavirus du fait de cette attente sera probablement bien supérieur à 2 décès par million d'attentistes. En d'autres termes la balance bénéfice/risque ne reste pas en faveur des vaccins à adénovirus qu'uniquement du fait de l'insuffisance de vaccins à ARN.
Bref, aujourd'hui on nous dit « vaccinez par vaccins à adénovirus », il faut écouler les stocks et couvrir le maximum de patients au plus vite. Mais c'est trop tard, l'autorité sanitaire n'a pas su contrôler les centres de vaccination. Depuis le début de la campagne de vaccination la presse a attisé le doute au nom de l'information alors que ces vaccins avaient encore leur place. Il y a eu et il y aura encore beaucoup de décès et de séquelles qui auraient pu être évités. Doit-on parler d'irresponsabilité,de manque d'intelligence, de cupidité, de psychose populaire, il y a certainement un peu de tout.
En tant que médecin traitant, je ne peux pas me permettre d'avoir l'air « con » au nom de directives de santé publique. Je ne vais pas me casser la tête à convaincre mes patients en dépit de mes convictions : Je ferais les rappels Astra aux patients volontaires n'ayant pas eu de problèmes particuliers lors de la première injection.
Pour en avoir discuté avec les collègues pharmaciens, je ne serai pas un cas isolé.
Dr Jean-Paul Gervaisot
