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Certificat d'accidents du travail sur Améli, l'impossible défi

Vous avez dû remarquer, pour ceux qui vont plus d'une fois par an sur Améli pro, la mise en place d'un service « certificat accidents du travail » : Nous, professionnels de santé seront maintenant sensés pouvoir faire en ligne ces certificats médicaux, initiaux et prolongations d'accidents du travail.
A bien y regarder l'objectif inavoué des créateurs de ce service semble de nous mettre à l'épreuve et qu'il nous soit impossible de l'utiliser au moins pour les certificats initiaux.

Défi tenu ! depuis des mois je scrute attentivement une faille et des circonstances optimales pour pouvoir réussir mon premier certificat initial dématérialisé « accident du travail ». Le produit a été extrêmement bien pensé, mission quasiment impossible, tetris ou candy crush à côté c'est de la rigolade. Tel qu'il a été conçu, le certificat médical ne peut être fait que le jour de l'accident du travail. Si le patient n'a plus pu travailler le jour même et qu'il se présente que le lendemain, le programme nous interdit de l'arrêter de la veille. Pour avoir un certificat initial complet, il faut donc que le patient se présente le jour de l'accident, qu'il ait vu son employeur ou le responsable des ressources humaines, que celui ci fait la déclaration « employeur », qu'il lui ait donné la feuille de soins, que le patient n'ait pas passé 10 heures aux urgences, qu'il ait obtenu un rendez-vous au cabinet médical le jour même et que sa caisse principale d'assurance maladie fasse partie de celles qui permettent la déclaration d'accident de travail en ligne..

Toute l'équipe se mobilise pour réaliser l'irréalisable et mettre en échec les stratèges de la sécu : Le secrétariat : « c'est un accident de travail ?, quand ?, vous avez la déclaration de soins ? vous avez votre carte vital ?, vous pouvez passer ce soir ? », et moi « Je suis disponible, je vous prends entre deux rendez-vous »
Bref on assure !

Après plusieurs mois de faux espoirs, la perle appelle le secrétariat : « J'ai mal au pouce, je ne peux plus finir ma journée, la patron m'a donné les papiers, je peux passer tout de suite »

Champagne !!!

L'homme d'exception arrive, il a tous les papiers. Examen clinique : contusion écrasement du pouce droit entre deux objets lourds, il fait des bonds quand je l'examine, mais c'est a priori pas cassé. Prescriptions diverses et on passe aux choses sérieuses.
La carte vital est fonctionnelle, elle passe, pulsations à 90
Le site Améli n'est pas bogué, pulsations à 100
Sa caisse principale, c'est la CPAM, elle accepte la déclaration en ligne, pulsations 110
Je rentre progressivement les données, date d'AT 120, feuille employeur 130, écrasement MP1 pouce droit 140, durée d'AT 150, durée de soins 160, un vrai marathon,
Je valide 180, 190, ça marche du premier coup, la déclaration initiale a été acceptée, 160, 140, 110, 90, palpitations, c'est orgasme mental, on a vaincu..

Le patient ne s'est douté de rien.


Je le revois quelques jours plus tard pour la reprise en soins : rendez-vous planifié à l'avance, du caviar, je fais un copié/coller « écrasement MP1 pouce droit » ,parce que comme tous les confrères le savent, si par malheur je mets « écrasement premier doigt main droit » le patient risque une convocation à la caisse pour « nouvelle lésion ». Et voilà, le tour est joué, travail d'orfèvre. Je sens qu'à la caisse ils vont imploser.


Cinq semaines plus tard, le patient revient. « Docteur il y a un problème sur la déclaration, ils ne m'ont pas payé, j'ai reçu cette lettre de la sécu ».
Il me la tend , je lis :
« Veuillez faire préciser à votre praticien le siège de la lésion : Pouce de la main ou pouce du pied  daté, signé, avec cachet du praticien ».

Ils sont vraiment très forts..

Dr Jean-Paul Gervaisot

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Derniére mise à jour : 19/10/16

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